Une manifestation créée en l’an 2001
Huit terrains de pétanque pour 65 âmes, c’est sans doute un record. Un de plus pour la moins peuplée des communes vaudoises. À Mauraz, chaque maison, ferme ou moulin semble disposer d’une étendue de gravier où peuvent s’entrechoquer les boules métalliques. «On pourrait peut-être concourir au Guinness Book», rigole le nouveau syndic Frédéric Pfeiffer, dit «Piper». Il y a 22 ans, ce technicien au Théâtre de Beausobre mettait sur pied ce tournoi international aux côtés de son prédécesseur Reto Zehnder.
Tout le village s’y met
Lorsque vient le temps du tournoi, au début du mois de juillet, tout le monde ou presque participe. Sur le terrain, à la cuisine, au bar ou comme simple spectateur, les habitants comme les invités externes au village y trouvent leur compte. Et il arrive que la population du village double ce dimanche-là.
Dans cette minuscule localité cachée dans un vallon traversé par le Veyron et le Morand, entre L’Isle et Pampigny, la compétition n’est pas le plus important. Les équipes de deux joueurs sont tirées au sort. «Les gens se rencontrent, c’est le principe du truc, continue l’animateur de la journée. Des amitiés très fortes se sont créées lors des anciens tournois.»
Dimanche, nous étions 32 participant(e)s, femmes et hommes, ados et grands-parents, agriculteurs ou citadins. C’est ainsi que moi, journaliste rollois, je me suis retrouvé en doublette avec la Maurazienne par alliance originaire de Pampigny Stéphanie Rochat, pour sa septième participation.
Je ne la connaissais ni d’Eve ni d’Adam. «Tout le monde est sur un pied d’égalité, chacun(e) a ses chances et c’est cool, raconte ma coéquipière, suivie jusque sur le terrain par son chien «Jean-Poil». Même si on est déjà tous assez proches, c’est une chouette journée où on se rassemble, on rigole et on mange bien.»
À la matinée de qualifications succède le repas de midi, devant la chapelle. «Cher tournoi international de Mauraz, j’ai le regret de vous annoncer que les poulets sont cuits», annonce au micro le syndic hilare, alors que la broche tourne encore. Une salade, un plat de riz ou un dessert; beaucoup de villageois(es) ont préparé un plat à partager.
La partie est serrée
Après une bonne digestion, retour au jeu pour les 32 participant(e)s. Aucune des seize équipes n’est éliminée. Et rendez-vous est pris au bord des terrains, un verre à la main, pour la famille et les amis. Et figurez-vous qu’à l’orée des demi-finales, malgré quelques frayeurs, Stéphanie et moi-même sommes toujours en course. Face à nous, des monuments! Tous deux plusieurs fois champions, l’ancien syndic et un habitué, un poil mauvais perdant, nous barrent la route vers la finale.
La partie est serrée. On passe de la transpiration sous un soleil de feu à de grosses gouttes de pluie. Après deux boules précises de mon équipière et un tir de ma part pour dégager le terrain, nous finissons par l’emporter sous les hourras du public.
Une commune atypique
La finale est presque une formalité, mais il faut résister à la pression des regards. Ceux des habitant(e)s comme des animaux, chiens, ânes et chevaux.
L’année prochaine, nous remettrons notre titre en jeu. Et l’ambiance sera à nouveau au rendez-vous. Mauraz est comme un monde à part entière. Une communauté tranquille entre champs et forêt, où tout le monde se connaît. Son ouverture annuelle au monde extérieur, c’est la pétanque.
«Quel bonheur on a de faire découvrir notre commune atypique chaque année», glisse «Piper» avant de retourner gérer le tournoi sur son tableau Excel.
TEXTE LÉO MICHOUD – PHOTOS SIGFREDO HARO