Voici la dernière chronique «Les objets ont une âme», écrite le 25 février 2020. Marly (FR), entre cartons, malles, boîtes, souvenirs et projets…
Chère lectrice, Cher lecteur,
Toi que je ne connais pas. Ou peut-être que si, sans le savoir. Qui a aimé ce que j’ai écrit au fil des années… Ou peut-être pas. Que j’espère avoir réussi à amuser. À faire sourire, parfois. Toucher, peut-être. Distrait, au moins.
Nous voilà arrivés au terme de cette rubrique, débutée il y a trois ans. Rubrique décalée et improbable: le pari n’était pas gagné d’avance! Il a fallu du flair et une relative prise de risque de la part du rédacteur en chef de votre beau journal de région pour y croire mordicus dès le début. Il y a mis lui aussi sa passion, que l’on sait communicative, pour accompagner la publication de ces quarante lettres. À ce mentor et ami, j’adresse ici mon affectueux et très réel respect.
Quarante lettres. À quarante et quelques objets avec supplément d’âme…Quarante amis et compagnons de route, aussi. Quarante photographies inspirées, mises en scènes et transcendées par Cat Soubbotnik, ma complice et amie de toujours. Cette lettre-ci est donc la quarante-et-unième et c’est à toi, chère lectrice ou cher lecteur, que je tiens à l’adresser. C’était une évidence. Pour te remercier d’avoir accepté de te laisser embarquer dans mon petit monde peuplé de féroces et dodues ingénues traqueuses de souris, d’ours-salière d’un mauvais goût très sûr, mais parfaitement assumé, de bijoux énigmatiques venus des Indes… Et de batteur-mixeurs à main en véritable bakélite colorée dans la masse. J’en passe et de plus exotiques. Mon petit théâtre à moi: costumes d’illustres inconnus et éclairage de Cat, sous le haut patronage et la bienveillance critique, mais toujours constructive, de Pascal.
Nous voici arrivés au terme de la représentation: chacun des acteurs va maintenant s’incliner devant vous et tirer sa révérence, avant de s’envoler vivre sa vie sous d’autres cieux et dans d’autres aventures. Ce n’est pas un adieu. Aucune tristesse ici. Une page qui se tourne, simplement, pour laisser à d’autres personnages et d’autres histoires le loisir de s’écrire. Et une invitation. Un rendez-vous. Une promesse aussi: nous nous reverrons un jour ou l’autre, comme le chantait Thierry Le Luron…
Il se trouve que je rédige cette dernière lettre au moment où j’ai choisi de mettre un terme à une traversée immobile – mais au long cours de l’imaginaire et du merveilleux – entamée il y a dix ans avec Rouge Coromandel, mon navire-amiral rêvé, boutique et musée à la fois, à l’enseigne des Mondes et des Merveilles. Si je vous en parle, c’est parce qu’il a été le déclencheur de toute cette aventure, fournissant idées et, souvent, objets à la rubrique. Il est bon que tous deux lèvent aujourd’hui l’ancre pour reprendre le large de conserve… Oui, j’aime les métaphores marines, vous l’aviez noté. En revanche, je n’ai jamais aimé la nostalgie: elle ne sert que de poil à gratter larmoyant au refus de regarder devant soi et d’accepter le temps qui passe. Nous nous en passerons donc, avec bonheur, pour vous lancer, dans un grand claquement de voiles et d’éclats de rire. «Merci! On vous aime! Merci, merci pour tout!» Pour avoir accepté d’être des figurants et des acteurs à part entière de l’aventure! Pour, qui sait, choisir de la porter plus loin et de la partager! Mais surtout, surtout: pour tout ce que j’aurais encore le plaisir d’écrire et de partager avec vous, sous une forme ou sous une autre, dès les prochaines semaines.
Mesdames, Messieurs. Moussaillons, Moussaillonnes: nous larguons les amarres! Mais vous emmenons avec nous, au long cours, sur d’autres routes. De la Mer des Sargasses aux comptoirs aux épices des Îles Sous-le-Vent, en passant par l’Expo de Coss. Au fil des rencontres et des lieux. Hauts les coeurs, à l’abordage! Et levons nos verres à de nouveaux rivages.
À bientôt…
Sandrine L. Mehr
mail@rougecoromandel.ch