La commune de Mauraz appelle à l’aide et lutte pour sa survie. De lire une telle phrase semble exagéré et pourtant c’est tout à fait réaliste s’agissant de la plus petite commune du canton. Si Mauraz n’obtient pas une aide financière d’un montant de CHF 675’000.-, le village risque d’être déclassé en zone hameau, ce qui implique qu’aucune construction ne sera plus possible et surtout qu’à partir de 2024, il y ait une possibilité de suppression des permis d’habitation.
Cette dernière hypothèse, Reto Zehnder, syndic de Mauraz ne la veut surtout pas pour la petite communauté de 60 habitants (dont une quinzaine de contribuables seulement). «Nous allons nous battre pour parvenir à sortir de l’ornière», lance-t-il. Alors quel est le problème? Le problème tient en un seul mot: «épuration». Mauraz n’est pas raccordée à une station. Or, pour répondre aux exigences cantonales et fédérales en matière d’épuration, elle est contrainte de se raccorder à un réseau.
Mais voilà, cela coûte cher et la commune n’a pas les moyens de financer la totalité des CHF 675’000.- nécessaires à la création d’un réseau communal, puis un raccordement à la station de relevage de Villars-Bozon. «Pour information, poursuit le syndic, dans le but de réduire le montant demandé pour nous aider, nous avons fait en sorte que le futur réseau s’arrête à la limite de chaque propriété. Il appartiendra donc à chaque propriétaire de se raccorder à ses propres frais.»
Et M. Zehnder d’expliquer la situation qui a conduit à cet appel à l’aide. «L’épuration était subventionnable jusqu’en 2003. Après c’est le principe du pollueur payeur qui a prévalu et le Canton a renoncé des subventions. Mauraz avait alors un accord avec le Canton pour une épuration individuelle pour chaque maison. Ces stations individuelles sont entretenues une fois par année par la commune. Cela a représenté un investissement par foyer de CHF 30’000.- à CHF 35’000.- par foyer.»
Mauraz face au mur
Ce système individuel est viable, mais si Mauraz veut conserver des zones constructibles, elle doit se soumettre à la loi fédérale obligeant toute zone constructible a être raccordée à une station d’épuration centrale (exception faites des zones hameaux).
Donc Mauraz est face au mur. En 2017, lors de l’assemblée générale de l’Association de Communes Vaudoises (AdCV), Reto Zehnder avait rencontré la conseillère d’Etat Jacqueline de Quattro qui lui avait indiqué que l’Etat de Vaud n’a pas les bases légales pour entrer en matière sur un soutien financier de ce type. Après discussion avec d’autres communes, l’idée d’un appel à l’aide avait germé. Aujourd’hui, c’est devenu une réalité. Toutes les communes du district de Morges et de l’AdCV ont reçu une missive. «À situation exceptionnelle, démarche exceptionnelle, poursuit le syndic. La commune s’est décidée à faire appel à la solidarité inter-communale et à des sponsors pour couvrir le montant de CHF 350’000.-. Mauraz propose de financer par ses propres moyens la station de pompage et la liaison avec la STREL de Villars-Bozon, pour un montant de CHF 325’000.-, qui représente le maximum que la commune puisse récolter en puisant dans ses réserves et auprès de ses habitants. La récolte de fonds est donc lancée pour le solde du financement, soit CHF 350’000.-.»
Dons ou prêts sans intérêts
Mauraz ne possède, à l’exception de sa chapelle, ni terrain, ni bien immobilier, ni forêt. Pour les CHF 350’000.- restants, la Commune envisage une campagne de recherche de fonds auprès des communes amies du district de l’AdCV et de certains privés. Elle cherche un soutien sous forme de dons ou par des prêts sans intérêt d’une durée de remboursement à négocier.L’organisation d’un «crowd funding» pour «vendre» le mètre de conduite à CHF 600.-, ou bien encore «vendre» les couvercles de regards gravés au nom d’un ou plusieurs donateurs, est également à l’étude. «En cas d’intérêt, la municipalité se déplace volontiers pour discuter avec vous de toutes les solutions envisageables.»
Si la solidarité des autres communes permet la réalisation de ces futures installations, alors il sera certainement le temps de reparler de la possibilité d’une éventuelle fusion de communes. Jusqu’à maintenant toute velléité de fusion était impossible, du fait que Mauraz n’était pas raccordée à un réseau central d’épuration. «Mais ne mettons pas la charrue avant les bœufs: notre commune est en sursis! Si elle ne finance pas son projet d’épuration, elle risque d’être déclassée en hameau, ce qui signifie tout simplement la mort de Mauraz!»
Pascal Pellegrino